L’impact des parcs éoliens sur la santé

Madame la Ministre,

Je souhaiterais aborder avec vous la question de l’impact des parcs éoliens sur la santé humaine.

En effet, la question est de plus en plus présente dans les médias et dans les lieux de débats. On peut ainsi lire depuis plusieurs mois dans la presse, des témoignages de riverains des parcs éoliens qui évoquent une détresse ou une souffrance ayant pour cause leur environnement…

Sur la question du « syndrome éolien » dont certains riverains de parcs éoliens wallons de dernière génération se plaignent, il semble en effet qu’aucune étude scientifique n'ait encore été réalisée à ce sujet en Wallonie…
Or, les éoliennes pourraient avoir un impact négatif sur la santé, si l’on se réfère à l’étude réalisée par Madame Nicole LACHAT, docteur en biologie de l'université de Neuchâtel.
D’un autre côté, je me dois de rappeler qu’à l’étranger, d’autres études ont aussi été publiées sur ce sujet, et que certaines d’entre elles ne vont pas dans le même sens. Pour exemple, les experts de l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail considèrent quant à eux que les émissions sonores des éoliennes ne génèreraient pas de conséquences sanitaires directes sur l'appareil auditif…

En Région wallonne, les parcs éoliens sont soumis à permis d'environnement et évaluation des incidences sur l'environnement. Aussi, les permis d’environnement comportent déjà certaines normes de protection des riverains en matière de bruit. Outre les conditions générales en matière de bruit, prévoyant des valeurs limites à l'immission variables selon la zone d'immission, l'autorité compétente peut également prescrire des conditions particulières d'exploitation spécifiquement adaptées au régime de fonctionnement des éoliennes. Ces conditions sont en l'occurrence établies en tenant compte du cadre de référence de 2002 pour l'implantation d'éoliennes en Région wallonne. Ce cadre de référence fait actuellement l'objet d'une révision de la part du Gouvernement wallon, y compris en ce qui concerne les normes de bruit.

Votre collègue le Ministre Henry a indiqué il y a deux semaines que, dans le cadre de l’actualisation du cadre de référence éolien, les aspects relatifs à la santé seront pris en compte. Madame la Ministre peut-elle me dire de quelle manière elle a été associée à ce travail ?

Peut-elle nous expliquer de quelle manière l’on a pris en compte, dans ce cadre de référence, les données et connaissances les plus récentes quant aux effets sur l'être humain ? Comment va-t-on à l’avenir pouvoir déterminer la meilleure méthode prévisionnelle d'évaluation des incidences sonores d'un futur parc éolien ?
Dans le dossier éolien, comme dans d’autres dossiers relatifs à la matière « Santé-Environnement » (ondes électromagnétiques, bruit, pollution, etc.), il est nécessaire de toujours observer un principe de précaution…

Avez-vous pu prendre connaissance de l’étude de Madame LACHAT ? Qu’en pensez-vous ? Quelle est la position du Gouvernement wallon sur la question ?

De quelle manière les autorités wallonnes gèrent-elles actuellement cette question ? Les associations de riverains qui font état de ce type de problème ont-elles déjà été entendues par les Ministres wallons compétents ?

Une étude sur ce même sujet a-t-elle été commandée par vos services ou est-elle en préparation en Région wallonne ? De manière exhaustive, pouvez-vous nous informer des études en cours dans les différents départements sur les corrélations qui pourraient exister entre l’installation d’éoliennes et l’impact que cela pourrait engendrer sur la santé des riverains ?

Réponse de Mme Tillieux, Ministre de la Santé, de l'Action sociale et de l'Égalité des chances

Dans le cadre de l'actualisation en cours du cadre de référence éolien, une étude a été bien confiée à un bureau agréé, ICA. SPRL, afin de réactualiser les normes de bruit des éoliennes en fonction des connaissances les plus récentes de leurs effets sur l'être humain. L'étude a aussi pour objectif de déterminer la meilleure méthode acoustique prévisionnelle d'évaluation des incidences sonores d'un futur parc éolien. Ce travail doit, bien sûr, déterminer tous les éléments spécifiques aux émissions sonores des parcs éoliens et proposer les moyens de les prendre en compte.

L'étude de Madame Lachat fonde les interpellations citoyennes qui me sont parvenues et j'ai chargé la Cellule Permanente Environnement Santé (CPES) d'y répondre dans le cadre de sa mission de guichet unique environnement-santé.

A la lecture de l'étude, la CPES regrette l'absence, au vu de la bibliographie, de la prise en compte de documents de synthèse élaborés par des panels d'experts, et notamment la synthèse des connaissances établie par l'Institut national de santé publique du Québec, « Eoliennes et santé publique, synthèse des connaissances ». Les informations partielles sont donc à prendre avec précaution.

Le rapport, « Impacts sanitaires du bruit généré par les éoliennes », du groupe d'experts de l'AFFSET rendu en mars 2008 recommande quant à lui d'étudier les incidences du bruit généré par un projet éolien au cas par cas. Une telle approche « au cas par cas », qui n'exclut pas un cadre normatif spécifique sur les normes acoustiques applicables aux éoliennes, peut être rencontrée au travers du processus des études d'incidences sur l'environnement, celles-ci devant inclure l'étude des impacts sur la population.

Le rapport canadien distingue plusieurs éléments qui peuvent servir de grille à l'analyse du problème et aux réponses à apporter :
• l'acceptabilité sociale: celle-ci est conditionnée par quatre groupes de facteurs tenant respectivement à la filière éolienne, au processus décisionnel, au projet spécifique et au milieu social. L'implication de la population le plus tôt possible dans le processus de planification et de mise en place d'un projet éolien est une condition de cette acceptabilité ;
• la nuisance sonore, ou le sentiment de nuisance entraîné par le bruit des éoliennes, qui peut être associée à d'autres facteurs tels que la visibilité des éoliennes ou la perception face aux éoliennes ;
• les infrasons et sons de basse fréquence, les connaissances scientifiques actuelles ne permettant pas de conclure toutefois qu'ils constituent une menace ;
• l'effet stroboscopique qui peut être modélisé et auquel des réponses peuvent être apportées;
• la sécurité et les nuisances en phase de construction et de démantèlement ;
• les champs électromagnétiques et tensions parasites ;
• l'effet synergique des nuisances.

Je n'ai pas connaissance d'autres études menées sur l'impact des éoliennes sur la santé humaine en Wallonie.

De telles études doivent être menées sur plusieurs années et je tiens à rappeler que, dans l'état actuel de la répartition des compétences en matière de santé et d'environnement-santé, toute étude épidémiologique de type cohorte relèverait a priori des compétences de ma collègue la Ministre de la Santé de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Réplique de Mme Salvi (cdH)

Je remercie Mme la Ministre pour sa réponse. Je n'ai pas de réplique particulière. Je pense qu'on est au début du processus, on sent combien les études sont partagées et que, indépendamment de la nuisance sonore, effectivement, il y a toute une série d'autres risques difficilement mesurables, qui sont plutôt de l'ordre du ressenti. J'entends bien, par ailleurs, aussi les difficultés de pouvoir chiffrer ce genre de chose. Je ne manquerai pas à l'occasion de pouvoir également interpeller votre collègue au niveau de la Fédération Wallonie-Bruxelles.